Page 1- Catherine: «Je pousse ma luck un peu»
Page 2- Charles: «J'ai mis cartes sur table»
Page 3- Félix: «On a l'impression de changer les choses»
Page 4- Léa: «Tu dis ce que tu fais et tu fais ce que tu dis»
Félix*
Région : Montréal
Secteur d'activité : Publicité
Poste : Stratège média
Il vend du rêve, et pourtant, il pose un regard réaliste et lucide sur l'industrie de la publicité. «C'est beaucoup moins glamour qu'on pense», lance Félix d'entrée de jeu. Il vit néanmoins à 100 à l'heure, et entre deux journées de fou parsemées de quelques événements mondains, c'est un professionnel somme toute satisfait de son sort que Les Affaires a rencontré.
Une industrie de jeunes
Le monde de la pub est moins prestigieux que ne l'aurait espéré Félix. «On commence pas mal plus notre carrière en remplissant des fichiers Excel qu'en faisant des pitchs pour décrocher de gros contrats. Mais il faut apprendre la base, je pense, et franchement, j'ai pu profiter d'un encadrement hors pair.»
Ce soutien est nécessaire, explique Félix, puisque les jeunes débarquent avec très peu d'expérience dans cet univers très stressant. «Et nos clients sont souvent très old school, des vieux de la vieille qui veulent des structures hiérarchiques. J'ai l'impression que chez nos clients, les jeunes n'ont pas la place que nous avons», dit Félix.
Injecter un peu de jeunesse dans cette industrie qui s'abreuve des nouvelles tendances paraît incontournable aux yeux de Félix. «Nous devons être des early adopters, toujours à l'avant-garde. Nous sommes responsables de l'image de marque de clients pour qui la perception fait une énorme différence.»
Un trait distinctif des professionnels Y, souligne le jeune publicitaire, c'est leur énorme besoin de rétroaction. «Nous sommes de la génération où nos parents nous félicitaient tout le temps. "Bravo ! Beau travail mon grand ! Quel beau dessin..." Mais pour les employeurs, pour les gestionnaires, ça dévore beaucoup de temps et d'énergie de faire des évaluations constamment.»
À l'instar des autres Y masqués, Félix souligne l'importance d'être suffisamment mis au défi, d'éviter à tout prix de tomber dans la routine. «Pour nous, le travail d'équipe est primordial. Et on travaille fort. J'ai des employés qui sont rentrés dimanche dernier, et ils ne gagnent pas 30 000 $. On veut vraiment réussir. Surtout parce qu'on a l'impression de vraiment changer les choses. Nous avons de la difficulté à lâcher prise, mais ça s'apprend.»
Une limite translucide
Difficile aussi d'apprendre le détachement «quand on peut être rejoint de cinq façons différentes en tout temps, illustre Félix. La frontière entre la vie professionnelle et la vie personnelle est devenue très mince. Les limites entre collègue et ami s'étiolent également. On travaille tellement souvent ensemble, à devoir souper au bureau par exemple, que des amitiés se forment, poursuit-il. Chaque soir, quelqu'un passe dans le couloir et demande "qu'est-ce qu'on mange ce soir ?" Dans les périodes de blitz, en soirée, on se retrouve une bonne douzaine à manger des sushis autour de la table de conférence.»
Mais au-delà des amitiés qui naissent au bureau, «j'aimerais ça, instaurer une politique du "sans courriels" après les heures ouvrables», dit le jeune publicitaire, jaloux de préserver sa vie personnelle, à laquelle il a déjà si peu de temps à consacrer.