IMMOBILIER COMMERCIAL. Trois villes, trois défis différents, un seul but commun : transformer leur centre-ville en destination de choix, prisée autant des citoyens que des touristes. L’objectif ? Retrouver leur lustre d’antan. Voici leur plan de match.
1. Saint-Jean : des vecteurs économiques importants
Saint-Jean-sur-Richelieu a investi environ 40 millions de dollars (M$) dans son projet de revitalisation, qui s’est amorcé en 2013. À cette époque, le taux d’inoccupation des locaux du centre-ville était de 40 %.
« Quand on atteint de 15 % à 20 %, ça devient très préoccupant, souligne le directeur général de la Ville, Daniel Dubois. Nous avons donc mis en place un grand chantier pour que la rue Richelieu soit de nouveau une destination plutôt que l’artère de transit qu’elle était devenue. »
Parallèlement aux travaux d’embellissement du centre-ville, la Ville a mis sur pied un programme de soutien à la vitalité commerciale pour favoriser le dynamisme économique : programmes de rénovation de façades, d’amélioration de suites commerciales au rez-de-chaussée et de bureaux, d’implantation de bureaux, fonds d’entrepreneuriat commercial et projets de terrasses. Au total, 1,2 M$ a été octroyé en aide financière, ce qui a mené à des investissements privés de plus de 4 M$. Le taux d’inoccupation est désormais de 9 %.
« Des occasions se sont aussi présentées en cours de route, indique Daniel Dubois. Des leviers qui n’existaient pas, comme le droit de préemption. »
Le directeur général est persuadé que pour transformer le centre-ville en destination, il aura besoin de « vecteurs économiques importants ». D’où l’acquisition, avec ce nouvel outil, d’une ancienne banque qui devrait céder sa place, en 2024, à un projet d’hôtel d’environ 80 chambres. La Ville flirte également avec un projet d’amphithéâtre qui pourrait remplacer le vieil aréna municipal et accueillir une formation de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.
Le programme particulier d’urbanisme du centre-ville est également en révision pour permettre une densification supplémentaire aux trois étages actuellement permis. Il sera soumis pour adoption au conseil cet automne.
« Il faut déborder le simple cadre de la revitalisation si on veut maintenir les gens au centre-ville, plaide-t-il. Avoir plus de résidents, plus de gens en transit, plus de gens en affaires permettra de créer un vecteur économique supplémentaire. »
2. Shawinigan : remplacer les grandes entreprises
La revitalisation du centre-ville de Shawinigan était bien engagée avant 2020. Les premiers grands travaux ont été réalisés en 2014, et dans la 5e Rue, le cœur du centre-ville.
La pandémie a toutefois laissé ses traces. Shawinigan abrite encore plusieurs grandes entreprises au centre-ville et comptait beaucoup sur les travailleurs pour y dépenser.
« La pandémie a changé plusieurs choses, avance le directeur des communications de Shawinigan, Frédéric Beaulieu. À CGI, Cognibox ou encore Services Canada, beaucoup de ces gens-là sont en télétravail et vont le rester. Au-delà de leurs baux, ces entreprises ne réserveront peut-être pas des locaux aussi spacieux. »
Pour faire face à ce défi, la Ville a plusieurs atouts dans sa manche. En plus d’avoir fait une large place à l’événementiel, qui attire de nombreux visiteurs, elle possède une bonne mixité entre les commerces et les résidences (plus de 75 % des deuxièmes étages sont des résidences).
Frédéric Beaulieu ajoute que les conséquences de la pandémie sur les commerces du centre-ville ont été moins grandes que prévu en raison de la diversité du tissu commercial et parce qu’il y a plusieurs boutiques implantées depuis longtemps. « Nous avons beaucoup de trésors cachés, admet-il. Des magasins et des restaurants qui font déplacer les gens. Ils les découvrent et y reviennent. »
L’autre carte dans le jeu de Shawinigan est le projet d’être désignée « zone d’innovation en transition énergétique », dont font aussi partie Trois-Rivières et Bécancour, et de bénéficier de l’implantation de la filière batterie. « On doit y inclure un milieu de vie, et le centre-ville sera le gros morceau de cette zone d’innovation, explique Frédéric Beaulieu. On espère que les développements majeurs dans cette industrie-là à court et à moyen terme vont permettre au centre-ville de prospérer. »
3. Trois-Rivières : requalification de friches
« Le centre-ville est en ébullition, ça creuse partout », lance le directeur général de Trois-Rivières, Mario De Tilly. Et pour cause : de nombreux projets sont en cours grâce à la stratégie immobilière de « récupération de friches » menée par Innovation et Développement économique Trois-Rivières, qui mise sur la requalification de terrains et de bâtiments pour attirer l’« entrepreneuriat innovant ».
Parmi les bâtiments mal utilisés du centre-ville qu’on a récupérés, on en trouve un qui a été transformé en centre de développement des produits du terroir. Tout juste à côté, il y aura un pavillon de recherche sur l’agriculture urbaine de l’Université du Québec à Trois-Rivières, mentionne le directeur général. « Ces deux bâtiments étaient sur des terrains contaminés qui faisaient une balafre au centre-ville, explique Mario De Tilly. Ce sont deux anciennes friches, une commerciale et une industrielle, qu’on a pu requalifier et qui représentent un investissement global de 66 M$. »
Trois-Rivières veut également récupérer un bâtiment à l’abandon depuis plusieurs années pour en faire un centre de décarbonation des milieux urbains. Un projet de centre de développement des affaires des Premières Nations dans un bâtiment patrimonial au centre-ville, un projet d’environ 40 M$, est également dans les cartons.
L’ancien monastère des Ursulines, qui appartient à la Ville, servirait à des projets qui se trament dans le domaine de la santé, en collaboration avec le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) local.
« Ce qu’on veut, ce sont des gens qui résident, travaillent et consomment au centre-ville, résume Mario De Tilly. Nous avons 8000 résidents dans le périmètre du centre-ville, et nous espérons que ça puisse augmenter. »