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Les particuliers cherchent comment réduire leur facture d’impôt après l’annonce du rehaussement du taux d’inclusion du gain en capital. La solution qui risque d’être la plus adoptée:morceler la vente de ses actifs pour ne pas dépasser 250 000 $de gain en capital annuellement.
Rappelons que le gouvernement fédéral a annoncé, au budget fédéral du mois dernier, que le taux d’inclusion du gain en capital passait de 50 % à 66,67 % pour tout montant dépassant 250 000 $pour les particuliers. Cette mesure s’appliquera dès le 25 juin.
Évidemment, comme personne n’aime donner plus d’argent au gouvernement, les gens se sont mis à explorer leurs options s’ils ne peuvent cristalliser leurs gains en capital à environ un mois de la date fatidique.
La stratégie qui semble s’imposer est de morceler ses actifs pour s’assurer que le gain en capital net ne dépasse pas 250 000 $annuellement.
«Si on ne morcelle pas, c’est une perte nette, c’est sûr, soutient Vincent Fortier, CPA et directeur principal en fiscalité à Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT). Donc, un particulier va vouloir étaler son gain en capital s’il en est capable.»«De ce qu’on voit présentement, c’est la meilleure façon de faire», ajoute Jacqueline Power, vice-présidente adjointe à la planification fiscale et successorale et à la distribution chez Placements Mackenzie.
La réserve
Cette stratégie est beaucoup plus simple lorsqu’elle concerne des actions cotées en Bourse, souligne Vincent Fortier. Il n’y a qu’à vendre les titres et calculer les gains et pertes en capital.
«Pour des biens immobiliers, ça devient plus complexe, dit-il. Est-ce que les acheteurs sont intéressés à être propriétaire de 33 % ou de 66 % d’un immeuble ?»
Si l’acheteur est d’accord, il est toutefois possible d’utiliser la réserve sur les gains en capital pour un maximum de cinq ans, ce qui permet de garder 1,25 million de dollars (M $) au taux d’inclusion de 50 %.
La réserve sur les gains en capital fonctionne de la manière suivante:lorsqu’une partie du prix de vente d’un bien devient payable après la fin de l’année d’imposition, le vendeur peut déduire une réserve. Celle-ci doit être raisonnable et est d’une durée maximale de cinq ans; un minimum de 20 % du gain en capital doit donc être inclus dans les revenus annuellement.
Selon RCGT, l’ARC considère comme «raisonnable»la formule mathématique suivante:gain en capital multiplié par le solde du prix de vente à recevoir divisé par le prix de vente total.
Est-ce que ça vaut vraiment la peine?
Les gens pensent souvent à payer moins d’impôt, mais il ne faut pas oublier non plus le coût de renonciation lié au morcellement des actifs.
Par exemple, si l’on vend des actions, le produit ne reste pas suspendu dans le vide. Les probabilités sont bonnes pour que vous réinvestissiez la somme, ce qui vous fournirait un rendement que vous n’obtiendrez pas si vous différez le gain en capital.
Vincent Fortier donne l’exemple d’un bien immobilier vendu pour 1,5 M $dont la portion de gain en capital serait de 1,25 M $. Le montant total d’impôt à payer sur une telle transaction, au taux marginal supérieur, serait d’environ 422 000 $avec une transaction sans morcellement. Mais en se servant d’une balance de prix de vente et de la réserve de cinq ans, cette somme s’abaisse à environ 333 000 $, une économie approximative de 89 000 $, dépendamment du moment où les paiements sont encaissés.
«Avec un rendement de 2 %, on rattrape cet écart de 89 000 $, remarque-t-il. Si j’encaisse le 1,5 M $à l’année 1 et que je paye tout l’impôt en vertu des nouvelles règles, il me restera 1,078 M $. Si je place cette somme et que j’ai un taux de rendement net d’au moins 2 % annuellement sur cinq ans, je comble l’écart.»
Si, au surplus, le vendeur a de l’espace dans ses REER ou son CELI, une partie de ce rendement sera à l’abri de l’impôt, observe-t-il.
Attention aux écueils
Vouloir étaler son gain en capital comporte tout de même son lot d’écueils.
Dans le cas d’une vente d’actions, il faut tenir compte de la pondération de son portefeuille une fois les titres vendus.
Jacqueline Power remarque également que les marchés boursiers bougent. Morceler son gain en capital pourrait coûter cher (si le titre monte après la vente) ou effacer le gain en capital (s’il baisse).
Du côté des biens immobiliers, il faut tenir compte, dans son calcul, des frais divers (droits de mutation, notaire, amortissement, etc.), mais aussi de la possibilité que l’acheteur fasse faillite, avance Vincent Fortier.
Et l’assurance-vie?
L’assurance-vie peut aussi être une option qui devient plus alléchante avec l’augmentation du taux d’inclusion du gain en capital, souligne Christophe Faucher-Courchesne, expertconseil au Centre d’expertise de Banque Nationale Gestion privée 1859.
«L’optique est toutefois différente, prévient-il. On évite le gain en capital, mais c’est le patrimoine successoral qui sera bonifié.»