La mise en chantier des projets résidentiels a battu son plein à Saguenay en 2023. Il s’agit d’une situation unique dans un contexte où les projets de construction résidentielle dans la province sont au ralenti.
En effet, pour l’ensemble du Québec en 2023, les experts ont constaté une baisse de 32% pour les mises en chantier résidentielles. Un constat qui détonne avec le Saguenay métropolitain qui enregistre pour sa part une hausse de 49% comparativement à 2022.
«Vous avez un taux d’inoccupation très faible, ce qui signifie des besoins énormes. Malgré le coût des matériaux de construction et les taux d’intérêt toujours élevés, la valeur des terrains au Saguenay est moindre qu’ailleurs. Cela peut expliquer en partie pourquoi vous faites mieux que le reste du Québec», explique le directeur du service économique de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), Paul Cardinal.
Ce sont 857 mises en chantier qui ont été enregistrées pour le grand Saguenay en 2023. À l’instar de ce qui est observé au Québec, ce sont les projets locatifs qui ont la cote.
«En 2023, ce sont 563 unités locatives (66% des projets résidentiels totaux) qui ont été mises en construction. Une forte augmentation comparativement à l’année précédente où c’étaient quelques 72 unités seulement», souligne- t-il.
Ces chiffres placent donc Saguenay numéro un dans la province en ce qui a trait l’augmentation des mises en chantiers. Il est à noter que les résidences pour personnes âgées sont comprises dans la catégorie résidentielle.
Maison
Pour ce qui est de la construction des habitations de type unifamiliale, une baisse est remarquée pour Saguenay.
«Moins 38% pour ce type de construction, ce sont des chiffres qui ressemblent à ceux qu’on observe pour le reste de la province. De façon générale au Québec, l’unifamiliale tant à diminuer au point qu’en 2023, ça été le taux de mise en chantier le plus faible jamais enregistré depuis 1955 pour cette catégorie», précise-t-il.
De nombreuses raisons sont évoquées pour expliquer l’abandon de l’unifamiliale, notamment: les taux d’intérêt, l’accès à la propriété et la taille des ménages qui tend à diminuer et qui nécessiterait moins de pièces dans les résidences.
Lac-Saint-Jean
Il est à noter que la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) qui comptabilise les mises en chantiers et d’autres types de données de même nature ne fait pas enquête sur les centres urbains de moins de 10 000 habitants. Il est donc plus difficile d’avoir un portrait global de la situation.
«À Alma, il y a une hausse des mises en chantier de 4% et à Dolbeau-Mistassini, c’est 41 chantiers de construction résidentielle pour 2023. Là où les choses changent, c’est pour Saint- Félicien où l’on observe une baisse de 50%», mentionne Paul Cardinal.
Nouveaux développements à Saguenay
L’entrepreneur général AR Construction est une firme de construction saguenéenne qui oeuvre dans les secteurs résidentiels et commerciaux. Son président Raphaël Dumais affirme que son entreprise n’est pas en croissance, mais qu’elle connaît depuis deux ans des années «records» pour la construction résidentielle.
«2024 est parti en lion pour nous autres. On développe des chantiers résidentiels sur de nouvelles rues à Saguenay. Il y a une rue qu’on fait dans le secteur de Laterrière avec une quarantaine de terrains. Également, en parallèle, on débute des projets dans le secteur de Mont- Jacob à Jonquière pour la fin de 2024 et les prochaines années on va travailler sur important chantier à Arvida qui comprendra la construction de 16 bâtiments de huit logements chacun», indique le président d’AR Construction.
La situation pourrait être meilleure à Saguenay
Raphaël Dumais précise que si les choses vont bien dans le secteur de la construction résidentielle, il y aurait néanmoins des nuages à l’horizon.
«Nous rentrons dans une période que je qualifierais de crise de terrains. Présentement, à Chicoutimi et à Jonquière, il n’y a plus de terrains à vendre», lance- t-il.
Une source dans le domaine du développement immobilier qui préfère taire son identité va dans le même sens. Elle explique que le manque de terrain à Saguenay est une résultante d’une mauvaise gestion de la Ville elle-même.
«La réglementation et les délais municipaux sont tellement énormes que ça prend une éternité pour ouvrir de nouvelles rues et obtenir de nouveaux terrains. Dans un passé pas si lointain, ça prenait trois mois pour obtenir les autorisations d’ouvrir une nouvelle rue, maintenant ça prend trois à quatre ans. Les départements à Saguenay ne se parlent pas entre-deux et tout le monde se renvoie la balle, c’est un enfer. On a un problème de logement au Québec, mais au niveau municipal, on a tendance à se mettre nous-même des bâtons dans les roues», explique-t-elle.
La personne ajoute qu’en plus de la lenteur administrative à Saguenay, il y aurait aussi des problèmes d’infrastructures.
«Dans le passé, il y a eu beaucoup de gels de taxes à Saguenay et il n’y a pas eu d’investissement dans les infrastructures de la Ville. Alors dans certains secteurs, le système d’égout est saturé. Alors même s’il y a des terrains potentiels dans ces secteurs, c’est impossible d’ajouter des portes puisque le système ne supporterait pas la charge supplémentaire», conclut-elle.
Par Maxime Hébert Lévesque