À LA CHASSE. Nous sommes en plein été, un été pas comme les autres. Chaud, humide, soleil et chaleur intense. Mais aussi, l'été de la pandémie, confiné, distancié, masqué, limité. Pas de terrasses, pas de voyage outre-mer ou de vacances exotiques. La Gaspésie est devenue le Saint-Tropez du Québec ; le canal Lachine, la promenade des Anglais de Nice.
Le recrutement en mode pandémie a pris un nouveau visage. Virtuel. Les réflexions sur de possibles changements de carrière ont pris une couleur fade, timide, conservatrice, pour les candidats et les employeurs. On s'ennuie de la poignée de main, des comités de sélection qui se tiennent dans les salles de conférences climatisées, du lunch en terrasse pour finaliser le contrat... Bref, on s'ennuie de la chaleur humaine, même si, soyons franc, le «pandétravail» (contraction de pandémie et de télétravail) ne s'endure pas si mal pour la flexibilité et cette forme particulière de liberté qu'il offre.
Nos journées sont rythmées comme des boîtes à musique qui alignent ces nouveaux échanges : «J'ai un Zoom à 15 h !» «Ah non ! Je suis en Teams à 15 h 15 !» «On se Google Meet à 16 h ?» Cette intensité qui nous rive à nos écrans fatigue. Alors, pour rire un peu et se détendre, au lieu d'écrire le bêtisier 2020 en décembre, j'ai décidé de le devancer. Voici donc ce qui m'a fait sourire, rire (souvent) et m'a amusé pendant cette période.
Assise dans mon «espace de bureau de confinement» en grande conversation avec une cliente. Au milieu de notre conversation, son fils de 6 ans s'invite dans notre Zoom : «Bonjour, madame [moi], vous savez, ma maman travaille trop. Il faut arrêter de l'appeler tout le temps, elle doit se reposer et s'occuper de nous !» (On salue le leadership du petit bonhomme.) Moi, de répondre, «Tu as bien raison, je vais raccrocher et ta maman va aller jouer au soccer avec toi.» Ce petit est sur ma liste des futurs leaders à surveiller.
Toujours assise dans mon espace confiné, je suis en entrevue de sélection avec un candidat pour un poste de cadre. Il porte une chemise, une cravate et un veston (il fait 45 degrés Celsius à l'ombre ; je lui souhaite d'avoir l'air climatisé). Au moment de la question qui tue : «Quelles sont vos expériences difficiles et vos erreurs de management ?» Son chat saute sur le clavier, fais basculer son verre de gin tonique (caché hors écran) sur son portable et je le vois, debout, en caleçon sous la chemise-veston-cravate. Le pauvre candidat se confond en excuses, tellement gêné qu'il se déconnecte direct de la session !
Encore assise (j'en peux plus !), je suis en comité de sélection en visioconférence avec cinq administrateurs, moi-même et le candidat. Il est 7 h 30. À la question : «Comment gérez-vous les différences culturelles et générationnelles dans votre équipe de direction ?» le candidat répond : «En toute humilité, je suis un décodeur universel.» Sérieusement ?
«Guerriers en pyjama»
Côté employeur, peu importe que nous soyons dans le contexte de la COVID-19, les exigences manquent parfois de réalisme. Voici deux grands classiques :
1. Un employeur à la recherche de son futur PDG me dit «Nous voulons un leader 100 % développeur en mode agressif (mais positif) et doux comme un agneau en interne.» Moi, de penser... «Connaissez-vous des guerriers en pyjama en flanelle ?»
2. Dans le même esprit, un employeur qui «tombe en amour» avec le candidat me demande : «C'est lui, c'est elle ! Mais combien en as-tu en stock pareil ?» Malheureusement, cette année, nous sommes back order !
Bref, malgré tout, garder le sens de l'humour est la meilleure protection contre l'«enlisement et les vertus négatives de notre époque». Admettons que nous en avons bien besoin ces temps-ci. En vrac, pour rire et sans décodeur :
- X a gardé son masque devant l'écran pendant l'entrevue en me disant qu'elle s'entraînait aux prochaines étapes, en personne.
- X m'a parlé de son conjoint toute l'entrevue pour me dire combien il était extraordinaire. (Ils partagent le même espace de travail.)
- Un candidat commence à manger devant son écran parce qu'il n'aurait pas le temps de la journée.
- X promet que, s'il était sélectionné pour le poste, il se ferait tatouer le logo de l'entreprise sur l'avant-bras en gage de sa loyauté et me montre à la caméra son dernier tatouage d'entreprise.