Un gigantesque parc solaire au Texas, deux projets solaires et de stockage d’énergie par batteries à Hawaii, une quinzaine de parcs éoliens en France… Et bientôt, la construction de la centrale hydroélectrique Innavik sur la rivière Inukjuak, au Nunavik, en partenariat avec la communauté inuite de la région. Active au Canada, aux États-Unis, en France et au Chili, l’entreprise québécoise de production d’énergie renouvelable Innergex multiplie les projets. Michel Letellier, son président, viendra parler du projet Innavik au Sommet Énergie, le 21 janvier prochain à Montréal. Il s’agit d’une présentation des Événements Les Affaires.
Pourquoi une centrale hydroélectrique au Nunavik ?
Michel Letellier : Dans les communautés éloignées du nord du Québec, l’électricité est produite avec du diesel. Or, le village d’Inukjuak caresse depuis longtemps le rêve d’avoir une centrale hydroélectrique. Fait rare, la rivière près du village conserve un débit suffisant pendant l’hiver pour permettre la production d’électricité. De plus, la communauté compte près de 2000 personnes, ce qui justifie la construction d’une centrale hydroélectrique au fil de l’eau de 7,5 MW. Il s’agit d’un projet d’environ 125 millions de dollars, dans lequel nous sommes partenaires à 50 % avec la corporation foncière Pituvik, détenue par la communauté inuite d’Inukjuak. Une fois mise en service vers l’automne 2022, la centrale comblera 80 % des besoins du village en électricité pour le chauffage, l’éclairage et l’eau chaude. On remplace ainsi un combustible fossile polluant par de l’énergie propre. Ce projet s’inscrit tout à fait dans notre philosophie des 3 P.
À quoi fait référence vos 3 P ?
M.L. : Trois P, pour Personnes, Planète et Prospérité. Pour les personnes, ça veut dire que nous traitons avec respect nos employés et les communautés où nos projets sont réalisés. Le deuxième P signifie que nous exerçons nos activités dans une optique de développement durable. Notre énergie est produite avec des sources renouvelables et nous essayons de réduire le plus possible les impacts de nos activités sur les habitats fauniques, les plans d’eau, la biodiversité. Et s’il y a des impacts, nous les compensons. Par exemple, si nous perdons un habitat faunique, nous en aménageons un autre ou même plus. Quant au 3e P, la prospérité, nous visons évidemment un rendement sur l’investissement, mais nous voulons que les communautés hôtes en profitent aussi. Dans le cas de la centrale Innavik, les bénéfices économiques seront partagés avec la communauté. Je dis souvent qu’il faut faire des profits, mais jamais sur le dos des deux autres P.
Créez-vous des partenariats avec les communautés hôtes dans tous vos projets ?
M. L. : Pas toujours, mais souvent. Par exemple, en Gaspésie, nous avons fait un projet éolien de 150 MW en partenariat avec des communautés micmacs. Nous avons aussi des partenariats avec des peuples des Premières Nations en Ontario et en Colombie-Britannique, avec la MRC de Rivière-du-Loup dans le parc éolien Viger-Denouville, et d’autres encore. C’est un modèle qui est dans notre ADN.
Quelle est la clé du succès avec les partenariats ?
M.L. : La patience, l’ouverture d’esprit, la transparence. Nous n’essayons pas de cacher des avantages financiers. Nous sommes transparents quant aux coûts et aux bénéfices. Il faut aussi être à l’écoute. Par exemple, en Colombie-Britannique, nous avons renoncé à un projet parce qu’une communauté autochtone voulait protéger une montagne sacrée. Lorsqu’un projet n’est pas acceptable pour une communauté, il faut être prêt à reculer. Nous sommes retournés voir cette communauté quelques années plus tard pour un projet dans un autre secteur. Et parce que nous l’avions respectée, nous avons pu conclure un partenariat pour un projet beaucoup plus gros. Nous travaillons dans l’harmonie et non dans la confrontation.
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