Le fabricant de produits de mobilité Savaria a dû transporter par bateau des stocks de produits de son usine en Chine vers ses entrepôts au Canada. (Photo: Getty Images)
SECTEUR MANUFACTURIER. Même si elles délocalisent une partie de leur production pour demeurer compétitives, les entreprises manufacturières ont tout intérêt à garder à l'interne leur savoir-faire pour continuer à fonctionner malgré une rupture de leur chaîne logistique.
C'est la démarche du fabricant de produits de mobilité Savaria, même s'il exploite une usine en Chine. La PME de Laval est présente dans les secteurs de l'accessibilité, des véhicules adaptés et du SPAN (des surfaces de soutien thérapeutique et des produits de gestion de la pression pour le marché médical).
(Photo: Savaria)
Au plus fort de la crise en Chine, son usine de Huizhou a été fermée du 22 janvier au 19 février. Cette fermeture aurait pu être catastrophique pour Savaria, car une partie de sa production est vendue en Amérique du Nord. Or, la PME québécoise a su éviter le pire.
«En janvier, quand on a compris que l'usine de Huizhou pourrait fermer en raison de la pandémie, on a transporté par bateau des stocks de produits de notre usine en Chine vers nos entrepôts au Canada», dit le vice-président des opérations Sébastien Bourassa.
Ce plan B était prévu depuis longtemps dans sa planification stratégique.
«Les pièces qu'on fabrique en Chine peuvent être techniquement faites au Canada. On a gardé à cet effet des équipements similaires à ceux qui fabriquent ces produits en Chine depuis 15 ans», explique M. Bourassa, en soulignant que ces équipements peuvent être utilisés au besoin en cas de rupture de la chaîne logistique.
Relocaliser grâce aux gains de productivité
Des entreprises peuvent aller beaucoup plus loin pour garder leur expertise stratégique au Canada et être plus résilientes en temps de crise, disent certains spécialistes.
Comment ? En rapatriant au Canada (ou en Amérique du Nord) de la production délocalisée à l'origine en Asie grâce des gains de productivité (la quantité de PIB produite dans une heure travaillée), ce qui permet de réduire les coûts de production.
Frédéric Scherer, PDG de la firme JITbase, affirme que sa technologie permet d'accroître la productivité et de limiter ainsi le recours à délocalisation. «On peut augmenter de 20 % la capacité d'utilisation de certaines machines, voire de 25 %», dit-il, en donnant l'exemple de l'un de ses clients, la société montréalaise Leesta.
Ce fabricant de pièces de précision pour l'industrie aérospatiale a réussi à augmenter de 25 % le taux d'utilisation sur une production durant un quart de travail, et ce, grâce à un opérateur qui gère deux machines.
Avant la pandémie, Lessta faisait face à une pénurie de machinistes expérimentés dans un contexte de rareté de main-d'oeuvre. Le logiciel de JITbase lui a permis de faire fonctionner deux machines en même temps, mais avec un seul machiniste.
L'entreprise montréalaise, qui n'était pas disponible pour un entretien, a autorisé JITbase à partager cette information avec Les Affaires.
Grâce à des algorithmes, le logiciel accroît le suivi des machines à commandes numériques dans une usine en indiquant à un machiniste quand il est attendu devant une machine sur le plancher de production. Les machinistes passent souvent inutilement du temps devant leur machine. Le nerf de la guerre, c'est de s'assurer qu'ils soient devant leur machine uniquement si leur présence est requise, par exemple pour faire une inspection, changer un outil ou préparer une nouvelle production.
C'est ce que permet la technologie de JITbase. L'entreprise a alors le choix soit de réduire le nombre de machinistes en gardant la même production, soit de garder le même nombre de machinistes, mais en augmentant la production. Dans les deux cas, cette entreprise fait des gains de productivité.