«C’est une grande surprise», affirme Martin Pelletier, chef de la stratégie au Groupe Novipro. (Photo: Jean-Sebastien Senecal.)
L’inflation et le spectre d’une récession sont parmi les causes qui expliquent des baisses d’investissement en technologie de l’information (TI) cette année, selon le rapport annuel 2023 sur cette industrie dévoilé lundi par le Groupe Novipro.
Selon le sondage mené en mars par Léger, seulement 76 % des organisations interrogées comptent sortir de l’argent de leur poche cette année pour des outils technologiques contre 92 % avant la pandémie en 2019. Il s’agit des plus faibles engagements depuis six ans.
«C’est une grande surprise, affirme Martin Pelletier, chef de la stratégie au Groupe Novipro, une entreprise qui offre des services en TI. La majorité des chantiers en TI avaient été arrêtés durant la COVID-19 pour se concentrer sur le télétravail et les autres éléments nécessaires pour faire rouler les affaires. Donc on pensait que les investissements en TI allaient reprendre.»
La récession, l’inflation et la pénurie de main-d’œuvre sont les trois causes les plus citées pour expliquer une diminution des budgets dans des domaines comme la cybersécurité et la numérisation. De son côté, le télétravail est de loin l’élément qui est le plus souvent mentionné par les entreprises sondées pour justifier une hausse des dépenses en TI.
Transformation numérique boudée
Malgré son importance croissante, l'analyse de données avancées et l'intelligence (IA) sont des domaines dans lesquels seulement 13 % des entreprises canadiennes prévoient investir, contrairement à 36 % en 2019.
«Je suis très préoccupé de constater qu’autant d’organisations repoussent une fois de plus leurs investissements technologiques, accumulant un retard important dans les résultats espérés de leur transformation numérique», affirme David Chamandy, PDG, Groupe Novipro.
Les coûts constituent le principal obstacle à l’investissement en analyse de données et en IA. Le manque de ressources et l’inflation représentent respectivement les deux autres facteurs clés.
«Il semble y avoir un pas de recul, estime Martin Pelletier. Les dirigeants ne comprennent pas comment l’IA et l’analyse de données permettent d'améliorer leurs processus. Le domaine financier mise beaucoup dans ce domaine, mais on est plus frileux du côté manufacturier qui aurait avantage à envisager l’IA. Les entreprises devraient chercher de l’aide de firmes en services-conseils pour les accompagner.»
Martin Pelletier remarque qu’il y a plus d’investissements en Ontario qu’au Québec, mais il ne s’en inquiète pas trop.
«Le Québec n’est pas en retard, mais plus prudent dans ses décisions, dit-il. Au lieu d’être les premières, nos entreprises regardent venir la vague avant de faire des choix éclairés. Quand tu es trop rapide sur une nouvelle technologie, tu peux te taper le nez sur le mur.»
Manque de main-d’œuvre
La septième édition du «Portrait des TI en entreprise au Canada» montre une fois de plus que la pénurie de main-d’œuvre se fait cruellement sentir dans ce domaine.
Le Québec connaît beaucoup plus de difficulté que les autres provinces à recruter des spécialistes en TI, comme des experts en cybersécurité, en IA et en infonuagique ainsi que des administrateurs de système. L’écart avec l’Ontario, qui a le plus de facilité au pays, est notable.
«La rareté de la main-d’œuvre peut avoir ralenti les investissements en TI, remarque Martin Pelletier. C’est l’histoire de l’œuf ou de la poule. Pour pallier le manque d’employés, les entreprises doivent miser sur des outils de numérisation ou d’automatisation, mais cela prend des ressources pour implanter ça. Externaliser certaines responsabilités, comme avoir des services informatiques gérés par un tiers, devient de plus en plus populaire.»