(Photo: 123RF)
ESPACES DE TRAVAIL. Pandémie oblige, bien des travailleurs sont cloîtrés à leur domicile et tentent d'effectuer leurs tâches quotidiennes loin de la convivialité du bureau. Dans ces circonstances, des entreprises font preuve de créativité pour maintenir les liens entre leurs employés et surtout pour nourrir l'esprit d'équipe en attendant de réintégrer leurs quartiers, possiblement cet automne.
Depuis l'appel à l'isolement préventif lancé par le gouvernement du Québec, en mars, la très grande majorité des quelque 80 employés de la firme de service-conseil en transformation numérique Talsom travaillent de la maison. «On a rapidement eu le souci de briser l'isolement. En créant des connexions, on a réussi à maintenir des liens», rapporte la vice-présidente de la transformation humaine et de l'expérience employé, Julie Lachaine.
Pour remplacer les discussions autour de la machine à café, un fil de messagerie instantané a été mis en place. Des séances d'entraînement virtuel et des cocktails en ligne ont été organisés par la firme. Le président, Olivier Laquinte, a aussi fait le point sur les opérations quotidiennement au cours des premiers mois de la pandémie.
Depuis le mois d'avril, une émission en circuit fermé - Talsom en parle - est produite tous les jeudis, de 16 h à 16 h 30. Des membres de l'équipe y expliquent la progression de leur projet, discutent de sujets d'actualité et y révèlent un talent méconnu. Même si les employés de Talsom sont loin les uns des autres, ce rendez-vous hebdomadaire les rassemble. «Mon pari, c'est que si tu manques l'émission, tu manques quelque chose, note Julie Lachaine. Et les employés attendent l'émission !»
Un suivi serré
Casacom, une entreprise de relations publiques et de communications intégrées, a aussi pris le taureau par les cornes pour maintenir l'esprit d'équipe. Méditation en ligne, parties de Boggle virtuelles, cocktail devant l'écran et pique-nique dans un parc - en respectant la distanciation physique - ont ponctué le quotidien des employés jusqu'au début de l'été. «Est-ce qu'on en a trop fait ? Peut-être. Mais personne n'a été laissé seul», insiste l'associé et vice-président de Casacom, Jean-Michel Nahas. L'entreprise a également fait un suivi régulier avec ses employés. Ces derniers ont participé toutes les semaines à des réunions virtuelles, en plus de recevoir quotidiennement une infolettre de la part de la présidente, Marie-Josée Gagnon, pour les mettre au parfum de l'état des finances, de l'annulation d'un projet et de l'arrivée d'un nouveau client. «Ça a montré qu'il y avait une direction, mais aussi une certaine humilité, précise Jean-Michel Nahas. On n'avait pas toutes les réponses. Les gens appréciaient ce suivi serré.»
La professeure à l'École des sciences de l'administration de l'Université TÉLUQ, Diane-Gabrielle Tremblay, avance qu'il est primordial que les entreprises communiquent efficacement avec leurs employés et qu'elles entretiennent l'esprit d'équipe au cours de cette période durant laquelle le télétravail est préconisé.
«C'est très important, car une des difficultés, c'est que certaines personnes peuvent se sentir isolées et perdre la dynamique du travail d'équipe», souligne-t-elle dans un échange de courriels. Elle précise qu'habituellement, le boulot à la maison doit être effectué préférablement à temps partiel ou occasionnellement pour éviter les désagréments.
Responsabilités des gestionnaires
En cette période de crise, la professeure Tremblay recommande aux gestionnaires de modifier leur façon de diriger. «Ils doivent apprendre à faire confiance à leur équipe, à lui donner de l'autonomie et à la responsabiliser, indique Diane-Gabrielle Tremblay. Ils doivent faire de la gestion par objectifs et par résultats, et non de la gestion "à vue" de façon contrôlante.» Ces mêmes gestionnaires doivent également s'assurer du bien-être de leurs employés pendant la pandémie, insiste-t-elle.
Malgré les nombreuses initiatives lancées pour maintenir les liens, les employés de Talsom souffrent de l'isolement, avoue Julie Lachaine. «C'est difficile. Ce qu'on fait dans la vie, c'est de la consultation. On accompagne des clients ; on est dans le relationnel.» Après avoir constaté la fatigue qui minait l'équipe, la direction de Talsom a exigé que tous les employés prennent trois semaines de vacances pendant l'été, dont deux qui soient l'une à la suite de l'autre.
Casacom, qui a aussi recommandé à son personnel de prendre des congés au printemps, a de son côté pris le pouls de ses employés grâce à des sondages internes, en les interrogeant notamment sur leur degré d'anxiété. «Le moral est bon, mais il y a toujours un petit nuage. On ne sait pas de quoi demain sera fait», mentionne Jean-Michel Nahas.