Quand vient le temps de mettre de l’essence dans sa voiture, il y a une entreprise qu’Olivier Laquinte évite parce qu’elle ne permet pas d’utiliser Paypass. (Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Quand vient le temps de mettre de l’essence dans ma voiture (parce que oui, je dois encore en mettre dans mon véhicule même s’il est rechargeable), il y a une entreprise que j’évite comme la peste. Pas parce que je n’aime pas son logo, son nom ou ses publicités, mais parce que je ne peux pas utiliser Paypass. Pourtant, d’autant que je me souvienne, ce fut la première entreprise à introduire le concept de paiement sans contact plusieurs années avant que la fonctionnalité apparaisse sur nos cartes de débit et crédit.
L’objectif de l’entreprise était louable: fidéliser la clientèle et améliorer le processus de paiement. Le problème est que lorsque Paypass est devenu accessible sur toutes nos cartes, l’entreprise en question a tardé à réagir et à s’adapter.
Elle a donc souffert du syndrome NIH, c’est-à-dire «Not Invented Here». Malheureusement, c’est une maladie qui touche plusieurs entreprises et qui ne se limite pas qu’aux nouvelles technologies. Elle est présente quand vient le temps de parler de plusieurs éléments organisationnels.
Le NIH, c’est le réflexe qu’ont bien des gens dans les organisations de refuser les idées parce qu’elles viennent d’ailleurs que ce soit d’une autre industrie ou d’un concurrent.
Au fil des ans, j’ai observé deux cas de figure.
Dans le premier, les organisations prétendent être très différentes de leurs compétiteurs afin de justifier des processus non standards qui nécessitent le développement d’applications spécifiques ou la modification des fonctionnalités standards des logiciels. Or, la plupart du temps, il n’y a pas de justifications suffisantes qui soutiennent le maintien d’une «exception». C’est avant tout un problème de gestion du changement et une mauvaise évaluation de ce qui constitue un avantage concurrentiel pour l’entreprise.
Le second cas de figure, c’est celui où une entreprise cherche justement à se démarquer de leurs concurrents. Comme dans le cas de la pétrolière, elle développe effectivement un processus, une offre de service ou une technologie qui lui permet de se différencier. Dans la poursuite de cet objectif, il arrive toutefois qu’on en vienne à confondre «innovation» et «invention». Or, ce n’est pas facile de découvrir quelque chose qui, de surcroît, sera commercialisable. Les inventeurs et inventrices sont une espèce rare.
À l’opposé, je crois qu’il y a beaucoup d’innovateurs et d’innovatrices parmi nous.
Comme vous le savez, il y a différents types d’innovations. Bien sûr, il y a les innovations révolutionnaires et disruptives. Ce sont celles qui frappent notre imaginaire et qui s’apparentent bien souvent à des inventions. Mais il y a aussi, et surtout, les innovations en continu. À mon sens, ce sont celles-là dont nous sommes tous capables, car elles résultent de l’observation et du désir d’améliorer la vie, que ce soit la nôtre ou celle des autres.
L’idée ici, c’est de construire sur le travail des autres, de capitaliser sur les inventions d’autrui. Pour y arriver, il y a une condition sine qua non: l’ouverture d’esprit. Il faut s’ouvrir à l’idée que nos concurrents font de bonnes choses, et qu’on peut s’en inspirer, que d’autres industries sont plus avancées dans certains domaines et que certaines de nos pratiques sont peut-être dépassées.
Il y a quelques semaines, j’ai écrit un billet dans lequel je m’interrogeais sur la capacité de Netflix à sortir gagnant de la guerre de la diffusion en continu, car Amazon, Disney+ et Apple ont à la fois fait des alliances stratégiques et ont ajusté leur modèle d’affaire afin de maximiser leurs revenus et être plus attirants pour les consommateurs.
Voilà un exemple d’invention, voire d’innovation de rupture contre une innovation en continu. Il y a certes un avantage à être le premier à développer un processus ou un nouveau modèle d’affaires, mais la partie n’est pas gagnée pour autant. Il est en fait peut-être plus facile d’améliorer quelque chose qui existe déjà.